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Présentation provisoire :

J’ai comme des papillons dans le ventre, et leurs battements d’ailes secouent l’intérieur de ma tête dans tous les sens, dans tous les sens.

Pourquoi fais-je ça ? Que suis-je en train de faire ? Comment ai-je appris à réparer tout cela déjà ? Je ne m’en souviens même plus.

J’ai comme des papillons dans le ventre, et leurs battements d’ailes secouent l’intérieur de ma tête. Je dis n’importe quoi. Je ne sais plus ce que j’ai dit. Sûrement toujours les mêmes choses.

« Bonjour, votre voiture n’est pas encore prête, elle le sera sûrement pour demain sans aucun problème. »

« Non, je suis toujours célibataire. »

« Est-ce que je pourrais vous aider à traverser la route, madame ? »

J’ai une grande partition dans la tête, qui défile, qui défile avec autant de fluidité que les réponses d’une leçon bien apprise.

Je prends une cigarette et l'allume et la fume. Je ne sais plus pourquoi je fume. Sans doute parce que tous les autres le faisaient.

J’ai une gueule d’ange, comme ils disent. Mais le reste, je n’ai pas.

Je suis juste habile de mes mains, et simplement poli.

Je n’ai pas peur d’aller vers les autres, mais peut-être que quelque chose en moi les fait fuir.

C’est vrai qu’en voyant avancer vers eux un gars couvert de cambouis, béret sur l’oeil, et pentagone sur l’épaule, le marcel juste assez noir pour qu’on ne puisse pas deviner la transpiration sur le dos et sous les bras, il y a de quoi comparer, même avec le prince le plus mal habillé.

Quand les gens me voient pour la première fois, ils me prennent pour un sportif. La réparation, c’est très tech***, mais malgré tout c’est un sport.

Je ne suis pas seulement doué avec les voitures. Les casse-tête, les objets électro***s, les ampoules électriques, la robinetterie, la serrurerie…

Mais je n’ai jamais été très doué avec les humains. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas les prendre. Ils ne sont pas très logiques. Ils ont beau presque toujours réfléchir de manière stratégique, je n’arrive pas à les prendre.

Leurs plis sont trop doux, leur peau me glisse entre les doigts lorsque je veux leur serrer la main, ils ne sont pas assez solides, et malléable à souhait. 

Leurs problèmes souvent cachés m’échappent. Je ne sais apprendre d’eux tant que je ne sais de quoi ils sont constitués. C’est comme avec les meubles, la tuyauterie, les robinets. Il y a une fuite, un pied cassé ? Le mode d’emploie est là !

Les hommes sont un autre problème. Avec les tuyaux, par***mple, je peux dévisser, désosser, déboucher. Pas avec les hommes.

Devrais-je essayer avec ces quelques uns riant devant moi de les désosser ? Cela m’aiderait peut-être à les comprendre.

Je vous avais parler de cigarette. Je suis fumeur, mais sans être accroc. Je fume pour le plaisir, et quand je n’ai rien d’autre à faire. J’adore les volutes de fumées qui s’étirent dans l’air comme des fées sortant d’un long sommeil, puis disparaissant ensuite sans se retourner. Elles m’intriguent. Elles m’échappent. Elles m’émerveillent.

Comme le ***.

Toujours là, sans jamais être même à chaque fois. Des personnes et des personnes voguant l’état d’un instant dans mon lit, puis disparaissant. Revenant sans cesse, ils sont plusieurs et différents. Mais jamais les mêmes et toujours aussi lents à s’éveiller dès le matin.

Le matin, je pars sans rien dire. Je leur laisse la fenêtre ouverte pour s’échapper, ils font comme ils peuvent avec ensuite. Je ne les revois pas après. Ils n’ont qu’à escalader le balcon, je ne vais pas laisser ma porte ouverte toute la journée pour eux. Ce gros balourd de Père Noël y arrive bien, c’est qu’eux peuvent aussi.

Je ne couche qu’avec des gens maigres et agiles alors ? Non, pas vraiment. Je n’ai pas vraiment de genre. Je ne sais pas vraiment à quoi ça sert. Je suppose que j’ai une petite préférence pour les personnes qui n’ont pas les yeux bleus, ça me fait peur, mais c’est sûrement tout. Et encore…

J’ai un chat aussi. Même les animaux sont moins compliqués que les humains. S’il est nourrit, il est content. C’est simple avec eux. Jusqu’à présent, un humain ne m’a jamais accordé une léchouille sur le bout du menton parce que je lui avais préparé une conserve. Ou même une omelette. J’adore réaliser de belles omelettes.

Je ne suis pas associal, je ne comprends juste pas comment faire.

Je suppose que c’est comme tout : il faut essayer pour le savoir.

Ce sera tout ? 

Une dernière chose. Mon respect pour les choses peut vous étonner. A vrai dire, j’ai toujours beaucoup respecter la valeur des objets. Le mérite est estimé selon le travail qu’il a coûté à avoir été fabriqué. Je respecte toute la Nature aussi. Arbres, plantes, herbes, rien n’est assez peu précieux pour qu’on y écrase ses pieds. Les animaux aussi, comme les chats, les chiens, les papillons, les cafards, les oiseaux en particulier. Les humains aussi ? Connaissant très peu les hommes avec lesquels je couche, ou m’y intéressant très peu, je pense les respecter en les traitant tous à égalité. Chacun a le droit de passer par le balcon pour s’évader. S’il y a des forçeurs de serrures, je ne peux en rien les arrêter. Surtout si c’est ouvrir discrètement les portes est leur métier, il faut bien qu’ils s’entrainent. Je ne connais pas les gens avec qui je couche, alors je ne sais pas si le cas s’est déjà présenté. Je ne m’intéresse pas à eux, et de toutes façons, la serrure n’a jamais été fracturée. Je n’ai jamais eu à porter plainte. Tant mieux. J’aurais tellement la flemme. Puis je ne connais pas les gens que j’enferme. Alors je ne vois pas pourquoi j’irais aussi les juger et aussi les condamner. A la Justice de signer tout ces papiers.

J’adore collectionner les coquilles d’escargots et les lunettes aux verres différents. Je trouve ça magique, pouvoir voir flou, carré, petit, large, à l’envers, le soleil atténué, la vie en rose et sur le côté.

J’aime bien les couleurs et les bizarreries logiquement expliquées. C’est pour cela que j’aime bien les papillons seulement épinglés. Quel plaisir de découvrir à travers leurs ailes transparentes la vie sous un vernis d’agathe ou d’opaline. Ce n’est pas étonnant si on les appelle « âme » en grec. Les papillons naissent sûrement de l’âme des gens, je ne vois pas comment il pourrait en être logiquement autrement.

Une fille est passée un jour. J’ai dit à Maurice « J’ai mal au ventre. Je peux prendre ma pose pour fumer un peu aux toilettes ? » Il m’a répondu, avec un de ces clins d’oeil complice, que c’était parce que j’avais des papillons dans le ventre. J’adore les papillons quand ils s’agitent ainsi dans mon ventre.

J’ai comme des papillons dans le ventre, et leurs battements d’ailes secouent l’intérieur de ma tête dans tous les sens, dans tous les sens. Je déteste quand ils secouent leurs ailes dans ma tête. Je ne peux plus rien faire après. Je ne sais même plus comment travailler. C’est à peine si je n’en oublie comment respirer.

Pourquoi fais-je ça ? Que suis-je en train de faire ? Comment ai-je appris à réparer tout cela déjà ? Je ne me souviens plus du tout.

J’ai comme des papillons dans le ventre, et leurs battements d’ailes secouent l’intérieur de ma tête. Je dis n’importe quoi. Je ne sais plus ce que j’ai dit. Sûrement toujours les mêmes choses.

« Bonjour, votre voiture n’est pas encore prête, elle le sera sûrement pour demain sans aucun problème. »

« Non, je suis toujours célibataire. »

« Est-ce que je pourrais vous aider à traverser la route, madame ? »

Jov Bjorganov. Ravi de vous rencontrer