"Oublie pas un truc, c'est que si l'éphémère existe, l'éternel aussi."

Un certain Alexander, juste un homme de plus, perdu dans ce monde de fous.

Ce matin-là, tout semblait se répéter, comme à chaque fois. Il la détestait, cette routine dont tout être humain était la malheureuse victime. Il s'était levé fiévreux, pris d'une irrépressible envie de vivre. Il la sentait, la vie. Cette boule de chaleur dans son abdomen. Cette soudaine envie de prendre les choses en mains, de tout changer, tout balancer comme si de rien n'était. Il ne travaillait pas ce jour-là, de toutes façons, il en était hors de question. Il n'avait pas le temps, pas ce jour-là. Lui, il avait autre chose à faire, il était bien trop occupé à vivre. C'était une belle journée. Soleil déchirant le ciel, oiseaux criaillant dans les arbres, vent soufflant sur l'herbe, rosée se déposant sur les pétales de fleurs. Ah, et cette odeur. Cette odeur de vie qui flottait. C'était l'essence pure de la vie que transportait la brise, c'était l'éternité. Ander était là, à la renifler tendrement, non, exagérément, jusqu'à s'en déchirer les poumons, rien que ça. Il y avait cette pureté dans l'air et il y avait la fumée toxique qui émanait de sa cigarette. Ce jour-là... une belle journée l'attendait, il le savait. C'était pas lui qui le sentait, c'était la vie qui le lui chuchotait. 

Et il continuait son manège, bêtement, parce-que c'était ce qu'il avait toujours fait. Sourire. A un tel point que l'hypocrisie s'était soigneusement agglutinée à son visage, le dépossédant presque de son humanité. Tout n'était que mensonges et vices. Peut-être qu'il était même dévisagé, qu'il n'avait pas de visage qui lui était propre. Comédien jusqu'aux tréfonds de son âme en putréfaction. C'est ce qu'on appelle être es.clave de son art. Torturé jusqu'aux bouts des doigts, l'art l'avait marqué à vif, l'Homme lui avait arraché son humanité, la réalité l'avait éventré et sa propre vie l'avait condamné à déambuler, apathique, attendant que le sort ne se résigne, qu'il trouve une nouvelle victime. Et pourtant, rien n'avait jamais changé, comme quoi, il était un parfait bouc émissaire. La réalité était comme ça, aussi impitoyable que la foudre.